La République Démocratique du Congo (RDC) se trouve aujourd’hui à un carrefour critique sur le plan politique et institutionnel. Les enjeux constitutionnels deviennent de plus en plus cruciaux dans le débat public, exacerbés par des changements de cap manifestes chez plusieurs leaders politiques.
Ceux issus de l’ancienne province du Grand Katanga, par exemple, soutiennent maintenant un État fédéral, une position qui contredit souvent leurs précédentes déclarations et suscite des interrogations sur leur intégrité et leur engagement envers l’unité nationale.
Le porte-parole du parti Ensemble, dirigé par Moïse Katumbi, incarne cette tendance, ayant récemment modifié son discours en faveur d’une révision constitutionnelle en faveur du fédéralisme.
Ce retournement souligne les incohérences grandissantes au sein d’une classe politique qui semble oscillée entre ambition personnelle et intérêt national. Cette situation fait naître un profond questionnement sur la sincérité des appels à l’unité nationale dans un contexte où les politiciens semblent davantage préoccupés par leurs intérêts personnels que par la sauvegarde du bien commun.
Les pères fondateurs de la RDC, ainsi que des dirigeants historiques comme le Maréchal Mobutu, avaient compris que préserver l’unité nationale était primordial pour le développement du pays. Leur expérience montre que des mouvements fédéralistes peuvent conduire à une fragmentation alarmante, laisser les provinces vulnérables face à des ingérences extérieures, et ouvrir la voie à des conflits internes. Ainsi, l’avenir politique de la RDC dépend de la capacité de ses dirigeants à transcender leurs ambitions personnelles et à adopter une vision unie et cohérente pour l’avenir de la nation.
L’absence de consensus et les risques de balkanisation
Le débat autour de la révision constitutionnelle est devenu un sujet rarement abordé en public, par crainte de raviver des tensions sociales déjà fragiles. Dans l’histoire tumultueuse de la RDC, la sécession du Katanga dans les années 1960 reste emblématique des dangers d’une décentralisation mal encadrée.
Les régions qui expriment des revendications autonomyques risquent de retrouver des patterns de fragmentation, comme en témoigne la montée de groupes armés et de mouvements séparatistes dans plusieurs provinces.
Thierry Vircoulon (2015) fait remarquer que “la peur d’une fragmentation du pays a conduit les leaders à soutenir à priori une approche centralisée pour maintenir l’unité.” Cet aveuglement fait fi des informations historiques et des expériences d’autres pays, prouvant que la centralisation, même si elle est vue comme une forme de contrôle, peut également provoquer des mécontentements et des révoltes, à long terme.
De plus, la menace extérieure que représente le Rwanda, qui soutient divers groupes armés dans l’est du pays, accentue la crise d’identité nationale. La RDC doit faire face à des forces hostiles qui cherchent à tirer parti de l’instabilité interne.
Si le pays devait adopter un modèle fédéral sans précautions adéquates, cela risquerait de permettre des ingérences étrangères plus fréquentes, voire une déstabilisation organisée par des acteurs externes cherchant à fragmenter le territoire.
Les témoignages des atrocités commises dans les régions troublées tels que le Kivu en sont la démonstration ; de nombreux groupes armés soutenus par l’étranger exploitent les revendications des populations locales pour justifier des actes d’agression et des violences inouïes.
Par ailleurs, les divisions socio-économiques qui existent entre les différentes provinces et les inégalités en matière de développement créent un terreau fertile pour le ressentiment et la mobilisation.
Le défi demeure que les élites politiques puissent traduire ces frustrations populaires en demandes constructives qui renforcent plutôt que de fracturer le tissu national. Avec une gouvernance responsable, il est possible de transformer les aspirations locales en éléments d’intégration nationale.
À ce propos, il est impératif que les dirigeants politiques prennent en compte ces réalités dans leurs discussions sur la révision constitutionnelle.
Une responsabilité évitée : la politique de l’autruche
Malgré ces enjeux pressants, de nombreux dirigeants politiques en RDC semblent se perdre dans un dédale d’intérêts personnels et de jeux d’influence, contournant les véritables préoccupations de la population.
Cette indifférence à l’égard de l’héritage laissé par les pères fondateurs et le Maréchal Mobutu, qui ont œuvré pour la consolidation de l’unité nationale, constitue une déception cruelle pour les Congolais.
Ces leaders, fascinés par des ambitions égoïstes, naviguent le paysage politique avec un pragmatisme machiavélique, flattant les sentiments régionalistes pour rassembler des soutiens, tout en sacrifiant le principe d’unité au profit de leurs objectifs individuels.
Les promesses d’autonomie que certains politiciens évoquent ne cachent souvent qu’une volonté d’installer leurs bases politiques dans des fiefs régionales. Ce phénomène devrait inquiéter la population, car un fédéralisme non organisé ne fait que riposter les fractures historiques et alimenter les tensions socio-politiques.
Il est d’une importance cruciale que les congolais se lèvent contre cette politique de l’autruche et exigent des leaders une prise de conscience de leurs responsabilités. Une gouvernance qui ne privilégie pas le bien commun mais qui, au contraire, renforce les bastions d’intérêt personnel ne peut conduire qu’à la dérive, à l’affaiblissement des institutions et à l’aliénation du peuple.
Il est impératif que les citoyens et les organisations de la société civile exercent une pression constante afin que les leaders politiques soient tenus responsables. Les mécanismes de contrôle et de balances doivent être renforcés pour garantir que les décisions prises répondent aux besoins du pays plutôt qu’aux ambitions de quelques-uns.
L’urgence de cette responsabilité collective se fait sentir, car la souveraineté de la RDC, testée à plusieurs reprises au cours des dernières décennies, pourrait subir des fractures irréparables si ces défis ne sont pas relevés.
Conclusion
La quête d’une révision constitutionnelle en RDC doit être abordée avec prudence et lucidité. Les politiques proposées doivent dépasser les ambitions personnelles des politiciens actuels et se concentrer sur la construction d’un futur stable pour le pays.
L’histoire montre que la centralisation excessive peut être un remède à une fragmentation signalée, mais cela ne peut être réalisé que dans un cadre de transparence, d’inclusion et de respect des droits de tous les Congolais.
L’heure est venue pour la RDC de se poser sereinement la question de son avenir, en honorant la mémoire des pères fondateurs qui ont œuvré pour l’unité et en dénonçant les comportements ambivalents de ceux qui, sous prétexte d’autonomie, pourraient creuser encore plus la sébile de la balkanisation.
Le combat pour une RDC unie, forte et solidaire doit être le véritable phare guidant les peuples du Congo vers une époque nouvelle, débarrassée des influences et manigances personnelles incrustées dans les rouages du pouvoir.